International Le 6 février 2017

L’hystérie anti-Trump

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L’hystérie anti-Trump

© Facebook officiel de Donald Trump (Album FIRST 100 DAYS)

L’hystérie absolue. Ils se croient en Allemagne, au soir du 30 janvier 1933. Ils se prennent pour Thomas Mann, ou son frère Heinrich, ou Klaus. Ils se prennent pour des héros, les seuls clairvoyants, nous serions les aveugles, les croûteux. Ils veulent nous faire croire que Donald Trump, c’est le Mal incarné, la plus grande erreur de casting depuis 84 ans. Et qu’il relève d’un impératif moral de le combattre par tous les moyens. Hurler à chacune de ses décisions. Caricaturer l’homme, même physiquement, lui qui n’a pas la chance de séduire comme le danseur félidé qui le précédait, oh il y aurait tant à dire sur l’infinie convenance des « humoristes » et caricaturistes, leur alignement sur le camp du Bien, leur moralisme de pacotille, leur inféodation aux forces de l’Argent, oh oui certaines forces, très précises.

Toute cette hystérie, contre qui ? Un vieux potentat, qui blanchirait depuis des décennies sous le harnais ? Un Castro ? Un Mugabé ? Un Kim, nord-coréen ? Un apparatchik biélorusse, en fonction depuis Brejnev ? Non : tout cet océan de vomissements est dirigé vers un homme au pouvoir depuis – à l’heure où j’écris ces lignes – 10 jours et 21 heures. C’est peu. Après 10 jours et 21 heures, Obama n’avait encore rien fait, George Bush Junior non plus, ni Clinton, ni George Bush Senior, ni Reagan, ni Carter, ni Ford, ni Nixon, ni Johnson, ni même l’autre danseur de rêve, JFK.

Je ne prétends pas ici que toutes les premières décisions du nouveau Président me ravissent. Je n’ai, à part Charles de Gaulle ou Pierre Mendès France, rarement été « ravi » totalement par une quelconque figure de pouvoir. Créon, par définition, se salit les mains, souvent les ensanglante, seule Antigone est pure. Je préfère Créon, il relève de l’Histoire. Mais enfin, où donc peut-il être question d’oser un quelconque bilan à l’issue de… 10 jours et 21 heures ? Vous vous rendez compte que certains, comme un célèbre site en ligne, d’audience mondiale, évoquent déjà, après 10 jours et 21 heures, l’opportunité d’actionner le célèbre « Impeachment », version américaine de la destitution. Ce fameux spectre, oui, que l’on brandissait en 1974 à Richard Nixon, pour cause de Watergate : mais enfin, cet infortuné (et brillant) Président, acculé au départ le 9 août, avait tout de même passé cinq ans et sept mois au pouvoir, et pas… dix jours et 21 heures !

Ce qui se déroule, en fait, c’est une exceptionnelle mise à l’épreuve de la communication. Le nouveau Président ne passe plus par les médias traditionnels, il décrète et se fait photographier en décrétant (image archaïque, un homme, un siège capitonné, un bureau années vingt, une plume, du papier, le cabinet debout autour, qui regarde). Cela donne une impression de solitude, de début du vingtième siècle, de toute-puissance, comme si s’existait aucun contre-pouvoir. Cette image, dûment préméditée, reprise en boucle par les caricatures, ne doit rien au hasard. Elle impose autant qu’elle provoque, nargue autant qu’elle interpelle. Le caricaturiste, qui croit être premier à tenir l’idée, Trump le précède : d’avance, il sait là où il sera tourné en dérision, livre volontairement du fourrage à son bourreau plumé, il a toujours une longueur d’avance.

Voilà. Nous pourrions aussi dire un mot de l’indécence d’Obama, qui, à moins de onze jours de son départ, n’a même pas l’élémentaire devoir de réserve et de silence qui a toujours été de mise. Nous pourrions donner la liste des dix pays, dont le Liban et l’Algérie, interdisant l’entrée à tout détenteur du passeport israélien, sans que cela ne fût jamais condamné par nos belles âmes. Nous pourrions rappeler la part du Mur déjà décidée sous Obama, ainsi que les milliers de tonnes de bombes larguées, en huit ans, dans le plus pur silence médiatique, par ce charmant prédécesseur, ce félidé, ce danseur.

Mais nous nous en tiendrons là. Nous avons face à nous la même cohorte, cette fois revancharde, que pendant la campagne. La même unicité de pensée. La même captation du Bien, pour mieux diaboliser la cible. Cela, nous ne le changerons pas. C’est le terrain de bataille. Simplement, de notre côté, sans adouber toutes les décisions du nouveau Président, loin de là, nous demeurerons dans l’exercice critique des vagues de gémissements. Et s’il faut déplaire, eh bien nous déplairons.

 

Découvrez d’autres textes signés par Pascal Décaillet sur son blog, « Liberté ».

Commentaires

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Meeaad Moradi

C'était très bien jusqu'à ce "Nous pourrions donner la liste des dix pays, dont le Liban et l’Algérie, interdisant l’entrée…

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Francis Allan

Monsieur Décaillet, Vous semblez pêcher par excès de bonne volonté. Votre détermination à confondre la presse libérale-progressiste (en particulier européenne…

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Meeaad Moradi

C’était très bien jusqu’à ce « Nous pourrions donner la liste des dix pays, dont le Liban et l’Algérie, interdisant l’entrée à tout détenteur du passeport israélien, sans que cela ne fût jamais condamné par nos belles âmes. » M.Décaillet, demander à ces pays de reconnaître la légitimité de l’Etat d’Israël c’est comme demandé à des déportés juifs de reconnaître la légitimité de l’Allemagne nazie. Ensuite vous osez parler de la partie du Mur américain construit par Obama, n’est-ce pas cocasse quand on connaît la taille du Mur de la honte israélien ? Votre amour infini pour Israël et la civilisation occidentale vous fait manquer le coche du bon article.

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Francis Allan

Monsieur Décaillet,

Vous semblez pêcher par excès de bonne volonté. Votre détermination à confondre la presse libérale-progressiste (en particulier européenne et francophone) vous pousse à une défense en bonne et due forme du nouvellement installé Président Trump.

D’autres angles s’offrent à vous. Vous pourriez, par exemple, citer l’hypocrisie médiatique qui a consisté à favoriser l’ascension de ce trublion, pour ensuite pousser des cris d’orfraie quand celui-ci parvient sur le trône en bonne partie grâce à leur propre soutien. Vous pourriez aussi mentionner que l’histoire ne se répète pas, que M. Trump semble malléable et plus pragmatique qu’idéologue, que ces excès de parole ne sont souvent que de la rhétorique. À la place, vous affirmez bien clairement que tous les critiques de Trump qui se font entendre sous nos cieux constituent des « forces [] très précises », hystériques et inféodées « aux forces de l’Argent ».

Et vous reprochez à ces derniers de grossir le trait en ce qui concerne le nouveau président états-unien ?

Enfin, venons-en à un point précis. Vous vous en êtes pris – à raison – au manque de critique substantielle concernant Trump, dont on n’aurait mentionné que « la couleur de ses cheveux ». Pourquoi donc tomber dans la même ornière en ce qui concerne son prédécesseur ? On comprend le procédé stylistique qui vise à tourner en dérision l’adoration médiatique de Barack Obama, le gendre parfait qui nous a été servi ces huit dernières années. Mais votre propos donne l’impression hélas de verser là dans une certaine condescendance.
À vous lire (et je me réfère également à d’autres de vos textes), Obama se réduirait politiquement à la doxa du parti démocrate. Soit. Pour le resteI, il serait de plus qu’un « charmant » homme (je ne peux voir ici autre chose que de la condescendance), un « danseur » (sous-entendu: il est sans substance grise, dans l’apparence pure), et finalement pas vraiment un homme, mais plutôt un « félidé » (vous voulez dire brillant par sa férocité et sa ruse ? on peine à comprendre exactement).
Un simple porte-parole de parti beau gosse ce Barack Obama ? On peine donc à comprendre le reproche fait à vos collègues – à raison, répétons-le – de rester à la surface concernant Donald Trump.

Pour ma part, vous n’avez pas besoin de vous faire défenseur d’un Donald Trump (ou Nigel Farage, que sais-je) pour critiquer de manière incisive les partis pris de notre presse d’opinion. Chacun peut critiquer Trump tout en reconnaissant des convergences entre ses opinions politiques et les siennes. Ce ne serait pas hypocrite; clairvoyant plutôt.
Allez, on nous vous attendons sur ce terrain M. Décaillet ! Je suis sûr par exemple, que vous déplorez les attaques généralisées du président Trump et de son administration sur la presse, ou après votre billet, sur la justice et la séparation des pouvoirs.

***
Un jeune romand partisan de la diversité d’opinion

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