Culture Le 23 mai 2017

Dan Ohlmann, grandeur et patience d’un miniaturiste

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Dan Ohlmann, grandeur et patience d’un miniaturiste

[J.Eigenmann]

Dan Ohlmann a deux passions : la création de maquettes et le cinéma. Il a donc réuni miniatures et objets de tournage cultes dans le musée qu’il a fondé à Lyon en 2005. Rencontre avec une référence dans un milieu artistique peu connu : celui de la miniature.

 

Une tête de dinosaure de Jurassic Parc d’un côté, un Batman grandeur nature de l’autre. Rencontrer Dan Ohlmann dans son atelier au Musée Miniature & Cinéma à Lyon, c’est entrer dans un univers surréaliste. Le sexagénaire a l’air, lui aussi, tout droit sorti d’un film, avec sa moustache et sa barbichette grises, son chapeau et ses bottines en cuir. Il est tout sourire, un peu agité. Sur une table de son atelier trône la nouvelle acquisition du musée : l’authentique skate volant de Marty McFly dans le film Retour vers le futur. Il était jusque-là dans l’atelier pour « retouches ». « Mais maintenant, il est prêt ! », se réjouit-il.

[J.Eigenmann]

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Mais si Dan Ohlmann rassemble dans le musée qu’il a créé nombre de décors, costumes et accessoires de films, il est avant tout miniaturiste. Dans les derniers étages de la bâtisse du 16ème siècle qui abrite le musée, on peut observer les couloirs d’une prison, le fond d’une piscine ou encore un théâtre en lambeaux. Le tout en version miniature, bien sûr : ce sont des maquettes.

Artiste, ce n’est pas un métier commun dans la famille de Dan Ohlmann: « Je pensais être le seul mais j’ai découvert un arrière grand-père qui était un éminent sculpteur. Et il paraît que j’ai la même tronche que le papi ! », s’esclaffe-t-il. Né à Montélimar, puis scolarisé dans la Drôme où il suit sa mère, le jeune Alsacien se rêve artisan avant de se voir artiste : à 14 ans, il veut arrêter l’école pour devenir ébéniste. « Je ne comprenais pas pourquoi on voulait me garder à l’école alors que j’allais être quelqu’un d’utile à la société. Je renversais les bureaux, je rendais des copies blanches, je me voyais comme une sorte de révolutionnaire ! ». Le jeune garçon obtient gain de cause et devient apprenti avant l’heure.

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Devenu artisan, Dan Ohlmann s’ennuie vite à « copier des commodes ». Il se met alors à créer des maquettes pour des décors de théâtre. En 1987, le petit miniaturiste devient grand : sa maquette de l’intérieur du luxueux Restaurant Maxim’s à Paris, tenu par Pierre Cardin, est remarquée. Il est invité dans plusieurs émissions à la télévision française, dont Champs Elysée avec Michel Drucker et Tous à la une, que présentait Patrick Sabatier : « Je me suis retrouvé dans des émissions avec Paul McCartney, Pavarotti ou Guns N’Roses, c’était grisant de partager leurs loges ! ». Porté par ce succès, il lance une exposition itinérante qui tournera en Europe, au Japon et aux Etats-Unis. Mais c’est de la ville de Lyon qu’il tombe amoureux en 1989. Il s’y installe et fonde un premier petit musée dédié à la miniature. C’est en 2005 seulement, avec l’aide d’une mécène suissesse, qu’il créera le musée qui existe aujourd’hui.

[J.Eigenmann]

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Soudain, une voix s’échappe du talkie-wakie de Dan Ohlmann et il nous faut interrompre l’entretien : il est temps d’aller placer dans le musée le skate volant de Marty McFly. L’artiste traverse le musée, presque sautillant, jusqu’à une vitrine vide à côté de la baguette magique de Harry Potter. Il y place la planche avec fierté. « C’est nouveau », dit-il en s’adressant aux visiteurs, « c’est le vrai skate de Marty McFly dans Retour vers le futur ! ».

Miniature et cinéma ne sont donc jamais très éloignés dans l’esprit et le cœur de Dan Ohlmann : « Je suis un grand gamin ! Et puis le cinéma, c’est comme la miniature, c’est un art immersif . En regardant une maquette, je veux qu’on puisse se faire un film, se demander : qu’a-t-il pu se passer là-dedans ? Je ne mets pas de personnage, mais beaucoup de détails, c’est ce qui donne vie à la maquette ». Pour chaque pièce miniature, le maquettiste prend d’abord mille photos, des mesures, puis passe plusieurs mois sur la table d’architecture, à construire. « Je ne crée pas de lieu, je ne suis pas un inventeur, mais plutôt un photographe 3D », sourit-il.

[J.Eigenmann]

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Si la miniature est un art, pourquoi celui-ci reste-t-il si peu connu ? « En France, on le lie à la maison de poupée, à l’enfance, on le confond avec un passe-temps domestique », regrette l’artiste. « Mais au Japon par exemple, c’est un art très respecté : les gens faisaient la queue pour voir mes maquettes ». Aujourd’hui, difficile pour un miniaturiste de vivre de son art. Dan Ohlmann suggère d’ailleurs à ses stagiaires d’avoir un métier à côté : « Je bosse parfois sept mois sur une maquette. Moi, j’ai besoin du musée pour vivre ».

Pourtant, il n’est pas inquiet pour l’avenir. Il travaille déjà sur un prochain projet, la miniature d’un palais cubain abandonné où vivent plusieurs familles. « Il se dégage beaucoup d’émotion des endroits qui ont un long vécu et qui sont laissés en rade ». Mais à l’ère du numérique, craint-il de voir les visiteurs se détourner d’un musée comme le sien ? « Non, nous avons besoin des objets. Les gens viennent au musée pour retrouver la matière ». Et pour croiser, peut-être, entre la miniature d’un loft new-yorkais et le skate volant de Marty McFly, un personnage singulier, nommé Dan Ohlmann.

[J.Eigenmann]

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Commentaires

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lejuste

complètement faux. je suis bien placé pour le dire.

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