© www.letour.fr
La centième édition du Tour de France de cyclisme débutera demain en Corse, pour se terminer 21 étapes et quelques 3403 kilomètres plus tard sur la prestigieuse avenue des Champs-Élysées à Paris où 198 coureurs répartis en 22 équipes se disputeront la victoire finale. Petit tour d’horizon des étapes clés et des favoris avant cette épreuve incontournable du calendrier cycliste.
Trois contre-la-montre, quatre arrivées en côte
Pour l’édition du centenaire, ASO – organe mandaté pour tracer le parcours – se devait de voir les choses en grand et avait l’obligation de rendre hommage aux nombreux cols mythiques qui ont permis au Tour de France de bâtir sa légende et d’entrer dans le cœur du public.
Après trois étapes en ligne sur l’île de Beauté, les coureurs retourneront dans l’hexagone pour y rencontrer une des premières difficultés de ce tracé : le contre-la-montre par équipe. Cette épreuve, toujours très spectaculaire, permettra, dès la quatrième étape, de décanter la course puisque certaines équipes comme la Sky de Christopher Froome, l’Omega Pharma Quick Step de Mark Cavendish ou encore la BMC de Cadel Evans, auront l’occasion de grappiller quelques précieuses secondes à leurs rivaux respectifs.
Après trois nouvelles étapes de transition destinées aux sprinters et aux baroudeurs, les favoris auront l’occasion de se tester une première fois sur la montée menant à Ax 3 domaines. Cette montée, courte mais sèche – 7,8 km à 8,2 % de pente moyenne – ne devrait pourtant pas créer d’écarts trop importants car les favoris vont sûrement rester sagement au sein du peloton afin de jauger le niveau de leurs adversaires.
Après le premier contre-la-montre individuel reliant sur 33 kilomètres Avranches au Mont-Saint-Michel et une nouvelle série d’étapes scabreuses mais qui ne devraient néanmoins pas bouleverser le classement général, les coureurs mettront le cap sur le sud pour faire face à l’une des étapes les plus difficiles de cette édition. En effet, la quinzième étape reliant Givors au Célèbre Mont Ventoux sera la plus longue de cette Grande Boucle 2013. Les coureurs auront 221,7 kilomètres à parcourir avant d’affronter le terrible « mont Chauve » et ses 20,8 kilomètres à 7.5 % de pente moyenne, soit 242,5 bornes au total ! Il est vrai que personne ne gagnera le Tour sur cette étape – puisqu’il restera encore un contre-la-montre individuel et trois étapes de haute montagne dont deux se terminant au sommet d’un col – en revanche, beaucoup pourraient définitivement le perdre.
Suite à cette étape dantesque, les coureurs bénéficieront d’une deuxième journée de repos – la première ayant eu lieu après la neuvième étape – pour se « retaper la cerise » avant d’affronter la dernière semaine de course que les observateurs qualifient de terrible. Pourtant, cette dernière semaine débutera en douceur avec une étape normalement promise aux baroudeurs puisqu’elle se termine en descente après avoir franchi un col de deuxième catégorie qui n’est pas assez pentu pour inciter les favoris à lancer de grandes offensives. Les coureurs se lanceront ensuite dans le dernier effort solitaire – 32 kilomètres entre Embrun et Chorgues – avant d’affronter l’étape la plus difficile et la plus attendue de cette Grande Boucle. La dix-huitième étape reliant Gap à l’Alpe d’Huez. En seulement 172,5 km, les coureurs devront gravir pas moins de six cols dont deux fois la très célèbre montée vers l’Alpe d’Huez. Escamotée par ses deux versants, la « Montée aux vingt et un lacets » permettra à tous les favoris de faire exploser la course ce qui offrira, à coup sûr, un spectacle palpitant. En effet, 3300 mètres de dénivelée positive vont indéniablement créer des écarts. De très gros écarts. Ensuite, il restera deux grosses étapes de montagne dont une arrivée au sommet du col de Semnoz long de 10,7 kilomètres pour une pente moyenne de 8,5 %. Certains coureurs devraient tenter leur va-tout pour récupérer du temps. Si tel n’est pas le cas, ils n’auront plus que les yeux pour pleurer… Ou pour regarder le vainqueur.
La délivrance interviendra le lendemain avec la toujours très sympathique étape menant aux Champs-Élysées. Dans un premier temps, le vainqueur paradera – accompagné de toute son équipe – en tête de peloton. Ensuite, il cèdera les avant-postes aux équipes de sprinters qui mettront en place leur « train » afin de placer leur coureur le plus rapide dans les meilleures conditions pour le sprint final. Deux-cents mètres de souffrance pour décrocher une victoire de prestige sur la plus belle avenue du monde et entrer… dans une autre dimension.
Un duel annoncé…
Le Tour a toujours vu s’affronter deux ou plusieurs champions. Offrant des duels passionnants, voire passionnels. Il y a eu, par exemple, la rivalité entre Raymond Poulidor et Jacques Anquetil au début des années 60. Ou encore cet affrontement d’anthologie, en 1989, entre le Français Laurent Fignon et l’Américain Greg Lemond qui a finalement vu ce dernier s’imposer avec huit petites secondes d’avance sur la coqueluche du public tricolore. Enfin, et plus récemment, le Tour a été l’objet d’une confrontation hors du temps entre un talent brut et précoce, le Luxembourgeois Andy Schleck, et un attaquant d’exception, l’Espagnol Alberto Contador.
Cette année encore, le coureur natif de Pinto – ville de 40’000 âmes située dans la banlieue de Madrid – sera toujours sous les feux des projecteurs mais il n’accaparera plus l’attention avec le Luxembourgeois Andy Schleck, car un autre protagoniste lui a piqué la vedette. Le Britannique Christopher Froome.
Lauréat du Tour d’Oman, du Tour de Romandie et plus récemment du Critérium du Dauphiné, le « Kényan blanc » – comme on a coutume de l’appeler – a été impressionnant de régularité et de facilité tout au long d’une année qui l’aura vu confirmer sa bonne forme affichée l’année précédente où il était monté, pour la première fois, sur le podium de la Grande Boucle. Cette année, le grand favori du Tour de France c’est lui.
Entouré d’une équipe Sky qui aura fière allure avec notamment l’Australien Richie Porte – vainqueur de Paris-Nice et deuxième du Tour du Pays Basque comme du Critérium du Dauphiné cette année – Christopher Froome pourra compter sur huit coéquipiers entièrement dévoués à sa cause. La quête de son premier maillot jaune. Lors d’une première semaine de compétition toujours très nerveuse, il pourra bénéficier de l’appui précieux de plusieurs rouleurs hors pair comme le Britannique Geraint Thomas – double champion olympique sur piste – ou encore le Norvégien Edvald Boassen Hagen qui s’est illustré cette année en remportant son tour national. En deuxième semaine, quand la route s’élèvera, d’autres coureurs prendront le relais. L’Espagnol David Lopez et les deux Biélorusses Kanstantsin Suitsou et Vasil Kirienka auront pour mission de limiter les attaques et, surtout, de durcir la course afin de faciliter une percée de leur leader dans les derniers kilomètres d’ascension.
L’autre grand favori, précédemment cité, est l’espagnol Alberto Contador qui, lui aussi, disposera d’une équipe forte et hétérogène qui devrait lui permettre de rivaliser avec celle de son concurrent direct. En effet, des coureurs comme Roman Kreuziger ou comme le triple champion du monde de l’exercice solitaire, l’Australien Michael Rogers, devraient lui permettre de limiter la casse lors du contre-la-montre par équipe de la quatrième étape. Il pourra également compter sur sa garde rapprochée espagnole – composée de Jesus Hernandez et Benjamin Noval – ainsi que sur l’Irlandais Nicolas Roche – douzième de la Grande Boucle et de la Vuelta l’an dernier – pour l’accompagner le plus loin possible en haute montagne.
En somme, la victoire finale devrait donc se jouer sur les qualités intrinsèques de ces deux coureurs tant leurs aptitudes en montagne et leur équipe respective semblent similaires. Alors, lequel des deux part avec les faveurs de la cote ? Difficile à dire. Christopher Froome a battu Alberto Contador à deux reprises cette saison. Il dispose donc d’un avantage psychologique certain sur l’Espagnol. Toutefois, le coureur de la Sky n’a pas encore remporté de grands tours contrairement au protégé de Bjarne Riis qui en a remporté cinq dont la Grande Boucle à deux reprises. Sur ce plan donc, c’est l’Espagnol qui part avec un avantage. Il sait comment vivre avec les attentes du public et comment gérer la pression médiatique liée au maillot jaune. Qu’en sera-t-il de Christopher s’il parvient à s’emparer du fauteuil de leader ? Aura-t-il la force mentale pour gérer cette pression et faire face à l’adversité, ou s’effondrera-t-il laissant ainsi un boulevard au « pistolero » pour remporter son troisième Tour de France ?
…Plusieurs outsiders…
Ce duel pour la victoire finale que beaucoup pensent inéluctable pourrait alors cristalliser la course et crisper ses deux principaux favoris. Cela offrirait donc des possibilités à des coureurs que l’on attend moins mais qui sont tout de même redoutables. « Les seconds couteaux ».
Étonnant vainqueur du Tour d’Italie 2012, le canadien Ryder Hesjedal fait figure de candidat sérieux pour une place dans les dix premiers du classement général. Entouré d’une équipe Garmin toujours très compétitive dans le contre-la-montre par équipe – vainqueur sur le Tour en 2011 – il devrait pouvoir, dès la quatrième étape, prendre du temps à ses adversaires. Le tout sera ensuite de savoir s’il a la « caisse » nécessaire pour tenir en montagne, voire même attaquer et créer des écarts comme il a su le faire lors des terribles étapes de haute montagne du Giro 2012. Pour ce faire, le coureur de la Garmin pourra notamment compter sur l’appui de Christian Vande Velde – huitième du Tour de France en 2009 – et sur l’Irlandais Dan Martin qui a explosé au plus haut niveau cette année en remportant coup sur coup, le Tour de Catalogne et la doyenne des classiques, Liège-Bastogne-Liège.
Quatrième de la Vuelta en 2011, troisième du Tour du Pays basque en 2012 et surtout deuxième du Tour de Suisse il y a deux semaines, Bauke Mollema sera le leader de l’équipe Blanco et sera à surveiller comme du lait sur le feu. Épaulé par des coureurs chevronnés comme son compatriote Robert Gesink, le Batave pourra s’appuyer sur une équipe très solide en haute montagne qui devrait lui permettre de durcir considérablement la course une fois l’arrivée des Alpes en troisième semaine. Il sera alors un candidat sérieux pour une victoire en haut d’un col, voire même mieux s’il parvient à limiter les dégâts en contre-la-montre.
Constat similaire pour le Belge Jurgen Van den Broeck. Sa quatrième place l’an dernier et des résultats encourageants cette année – neuvième du Tour de Catalogne et septième du Tour de Romandie – nous laissent penser que le coureur de la Lotto-Belisol sera au rendez-vous en juillet. Il pourra compter sur une équipe solide mais devra composer avec la présence d’un autre leader dans l’effectif de l’équipe belge. L’Allemand André Greipel qui s’était montré très prolifique l’an dernier en remportant trois étapes. Toutefois, le Belge a déjà montré par le passé qu’il savait se débrouiller seul. Heureusement pour lui, c’est dans l’exercice solitaire qu’il devra s’améliorer par rapport à l’an dernier s’il veut espérer titiller les meilleurs et enfin monter sur le podium à Paris.
Côté français, il faudra se méfier de Pierre Rolland, membre de l’équipe Europcar. Depuis plusieurs années, ce jeune coureur de vingt-six ans suit une progression linéaire. Meilleur jeune en 2011 avec, en prime, une victoire de prestige en haut de l’Alpe d’Huez, huitième l’an dernier avec une belle victoire d’étape à la Toussuire, il s’avance comme un autre candidat sérieux au top cinq. Cependant, s’il veut accrocher un podium à Paris, il devra se montrer plus véloce dans l’exercice solitaire. En effet, l’an dernier ce sont ses carences en contre-la-montre qui lui avaient fait perdre beaucoup de temps, brisant ainsi ses rêves de podium.
Dans la liste des coureurs à surveiller, voire à prendre très au sérieux, on notera également la présence de deux Espagnols : Joaquin Rodriguez et Alejandro Valverde. Le premier est un coureur explosif qui ne manquera pas de dynamiter la course lorsque la pente s’élèvera. Il pourra bénéficier d’une rampe de lancement de premier ordre en la personne de son compatriote Dani Moreno qui a remporté la Flèche Wallonne cette année. « Purito », comme l’appellent ses coéquipiers, devrait donc pouvoir s’illustrer sur les pentes très abruptes du Mont Ventoux et de l’Alpe d’Huez où il pourrait prendre du temps à plusieurs de ses concurrents. Toutefois, la victoire finale semble difficile à aller chercher tant ses lacunes en contre-la-montre lui font perdre un temps précieux, voire irrattrapable. D’autant plus que son équipe n’est pas la mieux armée pour le contre-la-montre par équipe dans les rues de Nice.
Le second nommé devrait également se battre pour une place dans les dix comme en témoigne sa bonne saison 2012 lors de laquelle il avait remporté une étape du Tour de France puis terminé deuxième du Tour d’Espagne derrière Alberto Contador. Sa régularité affichée tout au long de l’année écoulée et le nombre de « placettes » qu’il a obtenues ne font que corroborer cette hypothèse. Néanmoins, le poids des années commence à se faire sentir pour le coureur originaire de Murcie et la concurrence au sein de son équipe est importante, ce qui ne devrait pas faciliter sa domination. Si le Portugais Rui Costa, récent vainqueur du Tour de Suisse, ne bousculera sans doute pas la hiérarchie, un autre coureur pourrait, lui, montrer le bout de son nez ; forçant ainsi le directeur sportif de la Movistar à revoir ses plans et renverser l’ordre établi.
…Et une lutte féroce pour le maillot blanc
Ce coureur, c’est Nairo Quintana. Jeune Colombien de vingt-trois ans, il incarne cette nouvelle vague du cyclisme sud-américain et découvrira le Tour de France cette année, non sans ambition. Après avoir remporté le Tour de l’Avenir en 2010, la Route du Sud en 2012 et, surtout, le Tour du Pays basque cette année, il s’avance comme un candidat sérieux. Toutefois, il semble encore légèrement prématuré de l’imaginer se battre avec les meilleurs. Pourtant, sa résistance en montagne et ses honnêtes prestations en contre-la-montre font de lui un candidat sérieux pour le maillot blanc décerné au meilleur coureur de moins de vingt-cinq ans.
Un de ses plus sérieux adversaires dans la quête de ce maillot distinctif sera la nouvelle coqueluche du cyclisme français, le Franc-Comtois Thibaut Pinot. Dixième l’an dernier pour son premier Tour de France et lauréat d’une étape, le protégé de Marc Madiot devrait profiter de cette expérience pour améliorer son classement général final et pourquoi pas aller chercher ce maillot blanc qu’il avait dû laisser filer l’an passé au jeune Américain de l’équipe BMC, Tejay Van Garderen.
« TGV », comme le peloton le surnomme, avait profité d’une édition 2012 très axée sur le contre-la-montre et peu montagneuse pour remporter ce maillot et parader sur les Champs. II avait alors surpris tout le monde en terminant cinquième à Paris. Aura-t-il les ressources nécessaires pour rééditer cet exploit de l’an dernier ou rentrera-t-il dans le rang ? Difficile à prédire pour le moment. Néanmoins, sa récente victoire lors du Tour de Californie et son honnête septième place sur le Tour de Suisse laisse présager qu’il sera à nouveau très en forme et qu’il faudra donc compter sur lui pour aller titiller les meilleurs.
Cependant, sa progression pourrait être freinée par le retour au premier plan du vainqueur du Tour de France 2012, l’Australien Cadel Evans. En effet, le champion du monde sur route de Mendrisio revit après une année 2012 difficile. Sa troisième place sur le Giro cette année lui a permis de rebooster sa confiance… et ses objectifs. Ainsi, en affichant clairement ses ambitions pour le Tour, il pourrait obliger son jeune coéquipier américain à repousser d’une année supplémentaire ses rêves de gloire. À moins que « TGV » ne fasse une nouvelle fois la différence dans les cols et à la pédale face à son leader désigné… comme ce fut le cas l’an dernier.
Finalement, et pour conclure cette présentation des outsiders du Tour de France, une seule question persiste et semble sans réponse : dans quel état de forme allons-nous retrouver le Luxembourgeois Andy Schleck ? Parviendra-t-il à retrouver son lustre d’antan ou est-il condamné à traverser ce Tour du centenaire dans l’anonymat le plus complet ? Si l’on regarde ses résultats dans leur globalité, depuis sa deuxième place sur le Tour 2011, très peu oseraient le citer parmi les favoris. Entre abandons et frustrations, Andy Schleck n’a été que l’ombre de lui-même. Pourtant, agir de la sorte serait manquer de respect à un tel champion. Ne faut-il pas rappeler qu’il avait terminé deuxième du premier grand Tour auquel il a participé ? C’était au Giro, en 2007 : il n’avait alors que vingt-et-un ans. En 2009, ainsi que les deux années suivantes, il a également terminé deuxième du Tour de France. En prenant tout ceci en considération, peut-on vraiment se passer de mentionner le Luxembourgeois dans la liste des outsiders ? J’en doute. D’autant plus que son récent regain de forme – vingt-cinquième du Tour de Californie et troisième du classement de la montagne – nous laisse espérer un retour au premier plan de cet ancien champion qui ne demande qu’à retrouver les sommets et la place qui devrait être la sienne…
Sources:
http://www.letour.fr/le-tour/2013/fr/parcours-general.html
http://www.velochrono.fr/actu/2013/parcours-tour-de-france-2013/
http://teamsaxotinkoff.com/ny_news.asp?n_id=4077
http://www.slipstreamsports.com/
http://www.blancoprocyclingteam.com/
Oui, Adriano, je le sais. C'est une grosse erreur de ma part, mais merci de le souligner ;)