« Thank you », photo de remerciement publiée sur les réseaux sociaux le soir de sa victoire, le 6 Novembre 2012. © Instagram officiel de Barack Obama
De nos jours, Internet prend une part toujours plus importante dans notre quotidien. Nous l’utilisons à des fins multiples : consulter des mails, rechercher des informations, se documenter sur l’actualité, communiquer avec des proches et bien d’autres choses encore. Au-delà des pages internet dites « classiques », les réseaux sociaux acquièrent eux aussi une immense popularité. Facebook, Twitter, Tumblr, Linkdin, Google+ ou encore Instagram regroupent effectivement de jour en jour de nouveaux adeptes. D’après des statistiques publiées au début de l’année 2013 par le cabinet Trendstreami, et concernant le dernier trimestre de 2012, Facebook regrouperait 700 millions d’utilisateurs actifs (c’est-à-dire se connectant au moins une fois par mois), 343 millions pour Google+, ainsi que 288 millions pour Twitter. Selon InSitesConsultingii, dans une enquête menée en 2010 sur l’utilisation des réseaux sociaux autour du monde, 72% du total d’internautes étaient inscrits sur un réseau et environ 70% de ces « réseauteurs » sur en tout cas deux plateformes.
La classe politique n’échappe pas à cette expansion fulgurante d’Internet. En effet, les hommes politiques s’en servent de plus en plus pour afficher leurs programmes et promouvoir leurs campagnes. Ils le font à travers des sites web personnels, ainsi que par le biais de celui de leur parti, mais également en passant par les réseaux sociaux. On observe un nombre croissant de personnalités politiques possédant un profil sur un ou plusieurs réseaux. L’exemple le plus intéressant est celui du président des Etats-Unis, Barack Obama. Ce dernier mise énormément dans son plan de communication sur l’utilisation de ces réseaux et dispose d’une équipe s’occupant de tenir à jour ses différents profils virtuels. Chris Hugues, cofondateur de Facebook, est par ailleurs à la tête de cette équipe. Obama y a eu recours durant ses deux campagnes électorales et continue inlassablement durant l’exercice de son mandat. Il est présent sur près de 15 réseaux sociaux et même sur certains dédiés à des communautés spécifiques, comme Black Planetiii (communauté noire) ou Eonsiv (babyboomers), afin de toucher le public le plus large possible. Quel est donc l’impact de l’utilisation des réseaux sociaux sur le plan de communication d’Obama et pourquoi cela fonctionne-t-il ?
Le site internet Kloutv, outil permettant à ses utilisateurs d’estimer leur taux d’influence sur la toile, donne un score de 99/100 à Barack Obama, ce qui le place dans les personnalités les plus importantes du web. En plus du simple fait d’être populaire, la présence d’Obama sur les réseaux sociaux lui est très utile sur le plan politique ; il arrive par ce biais à être plus proche de ses concitoyens, voire au-delà puisque la politique américaine est suivie en dehors de ses frontières, et à promouvoir ses idées de manière simple et rapide.
Au matin de sa première élection, Barack Obama cumulait 32’425’737 fans sur Facebook, 22’364’640 followers sur Twittervi, et plus d’1’656’000 abonnés sur Instagramvii. Une photo postée sur les profils Twitter et Facebookviii du président pour annoncer sa réélection mettant en scène sa femme et lui avec le slogan « Four more years » est devenue à la fois le cliché le plus aimé depuis la création de Facebook avec 2,1 millions de « j’aime » et le post le plus partagé de l’existence de Twitter avec plus de 420’000 retweets en deux heures. Durant ses deux campagnes, le président des USA a alloué de grandes ressources à sa propagande digitale. Entre les deux campagnes, la popularité des réseaux sociaux a considérablement changé : en 2008, seule une certaine élite y avait recours alors qu’en 2012 plus de 50% des Américains sont, d’après CNNix, membres d’un réseau social. La présence de Barack Obama sur Facebook, Twitter ou encore Youtubex a elle aussi redoublé, conscient de l’avantage qu’il pouvait en tirer. En effet, les réseaux sociaux donnent aux électeurs la possibilité non seulement de suivre la campagne, mais également d’y participer. Le fait par exemple de retweeter un post émanant de Barack Obama permet de diffuser ce message, l’internaute devient un membre actif de la campagne. Cela dépasse largement le bouche à oreille car la communauté des réseaux sociaux est immense. Sa communication se base essentiellement sur des messages simples, des photos et des graphiques reprenant les principaux axes de sa politique.
Le président ne s’est pas contenté d’exploiter le digital uniquement durant ses campagnes électorales. Tout au long de son premier mandat et encore actuellement, les réseaux sociaux ont une place immense dans sa stratégie. Son profil personnel sur Facebook, ainsi que celui de la Maison Blanchexi sont mis à jour quotidiennement. On peut y trouver différents contenus allant de photos décontractées du président à des informations politiques, ou encore des vidéos de ses discours, en passant par des messages de soutien à ses concitoyens. Ses comptes Twitter, Tumblr, Instagram ou Google+ reprennent le même type d’éléments.
Tenir ses profils sans cesse à jour permet au président Obama de rendre compte de ses activités et ainsi de donner une image très active ; une manière de rappeler à ses électeurs qu’ils ont eu raison de lui faire confiance. Une « photo du jour » est, par exemple, postée quotidiennement sur ses différents comptes ; celle-ci le met en scène soit lors d’un déplacement, soit lors d’un rendez-vous officiel ou encore lors de moments décontractés. Le fait de montrer des photos ou vidéos (on peut le voir notamment chanter le blues à la Maison Blanche) du président – le plus souvent entouré de ses proches – lors de ses moments de loisirs, permet de démontrer qu’il est lui aussi une personne ordinaire et d’afficher une image de bon père de famille, ce qui plaît énormément à l’électorat américain.
Barack Obama se sert en quelque sorte de la toile comme d’un grand panneau d’affichage. De nombreux slogans y figurent et les internautes sont invités à les partager avec leurs contacts, de même que durant la campagne électorale, afin que ce tableau d’affichage grandisse le plus possible. Dernièrement, par exemple, le président des Etats-Unis a mené une lutte acharnée au Sénat afin d’augmenter le contrôle sur les armes. Il est possible de suivre à travers Facebook ou Twitter la progression de son action quant à cet enjeu. « Retweetez si vous êtes d’accord : chaque famille qui a perdu un être cher à cause de la violence des armes mérite un vote. »xii, « Nous devons dire au Congrès qu’il est temps d’instituer une vérification des antécédents pour chaque personne qui veut acheter une arme à feu. »xiii ou encore « Regardez en direct : le président Obama explique au Connecticut pourquoi le Congrès doit agir pour réduire la violence des armes »xiv sont des phrases qui ont été postées sur son compte Twitter et partagées à chaque fois par des centaines de personnes.
Faire passer des messages par le biais des réseaux sociaux permet de toucher un public très large car il n’y a effectivement pas besoin de s’être intéressé particulièrement au sujet pour en recevoir le contenu. Par exemple, il n’est pas nécessaire d’avoir recherché ce qu’Obama a fait quant à la problématique des armes à feu pour obtenir sur sa page d’actualité Facebook ou Twitter des informations sur le sujet ; il suffit d’être abonné à la page officielle de Barack Obama ou de la Maison Blanche ou simplement qu’un de nos amis virtuels ait partagé le contenu. Les réseaux sociaux font partie intégrante de la vie de nombreuses personnes, particulièrement les jeunes, et il est donc facile de les toucher par ce biais.
Toutefois, si l’utilisation des réseaux sociaux a été une immense réussite pour Obama (certaines études avancent même qu’il n’aurait probablement jamais été élu sans cette stratégie de communication), elle n’est pas toujours aussi fructueuse pour tous les hommes politiques. En France, par exemple, les résultats n’ont pas été très probants pour François Hollande ou pour Nicolas Sarkozy. Cela est dû à plusieurs facteurs. Tout d’abord, les budgets alloués aux campagnes électorales sont beaucoup plus importants aux Etats-Unis, tandis qu’ils sont en France plafonnés à une certaine somme, ce qui ne permet pas aux candidats d’investir un grand budget dans des campagnes digitales. De plus, et c’est probablement la raison principale, alors que les Américains ont plutôt tendance à utiliser les réseaux sociaux pour se fédérer autour d’une personnalité politique, les Français ont eux plutôt tendance à s’en servir pour dénigrer leurs représentants. À tout cela s’ajoute également le fait que les Français sont apparemment moins impliqués globalement en politique et donc également sur les réseaux sociaux que la population américaine : pour prendre l’exemple de Twitter comme élément de comparaison, au début de l’année 2012, la page de Barack Obama comptait 12 millions de followers pour 310 millions d’américains, alors que celui de François Hollande en totalisait 187’000 pour 65 millions. D’après ces chiffres, on peut conclure qu’à population égale les Américains sont dix fois plus impliqués en politique sur les réseaux sociaux que les Français (il faudrait cependant un peu nuancer cette affirmation en tenant compte du fait qu’une partie des followers d’Obama ne sont probablement pas américains). Quant à la Suisse, il semblerait qu’une part des partis politiques boude quelque peu l’utilisation des réseaux sociaux.
Pour conclure, les réseaux sociaux, en raison de leur adaptabilité et de leur immédiateté, sont d’excellents biais de prise de parole et constituent très certainement de puissants outils politiques. Ceux-ci n’ont toutefois pas la même force de frappe suivant le lieu, la situation et le public visé.
[i] http://www.01net.com/editorial/585353/google-plus-talonne-facebook-dans-le-classement-mondial-des-reseaux-sociaux/
[ii] http://www.blueboat.fr/combien-dutilisateurs-des-reseaux-sociaux
[iii] http://www.blackplanet.com
[iv] http://www.crunchbase.com/company/eons
[v] http://klout.com/BarackObama
[vi] https://twitter.com/BarackObama
[vii] http://web.stagram.com/n/barackobama/
[viii] https://www.facebook.com/barackobama
[ix] http://www.01net.com/editorial/579501/les-reseaux-sociaux-latout-majeur-dobama/
[x] http://www.youtube.com/user/BarackObamadotcom
[xi] https://www.facebook.com/WhiteHouse
[xii] https://twitter.com/BarackObama/status/321398731431874561
[xiii] https://twitter.com/BarackObama/status/321382913981693952
[xiv] https://twitter.com/BarackObama/status/321378755253776384
Quand on sait que cela ne réussit vraiment pas à tout le monde ... petite dédicace à Christine Boutin et…