Erasmus censuré © www.wikimedia.org
Afin de combler le vide laissé par la disparition forcée du programme d’échange d’étudiants et d’enseignants Erasmus (à vos souhaits), et dans le souci de proposer une alternative crédible à la conscription pour ceux qui trouvent l’armée désarmante, je propose la création d’un service de mercenariat sur la base du volontariat, qui sera ouvert tant aux femmes qu’aux hommes suisses, étudiants ou non. Ainsi, en plus de renouer avec une tradition ancestrale, qui a contribué à forger l’image d’une Suisse forte et puissante, nos jeunes pourront continuer à voir du pays, à s’entraîner au maniement d’une langue étrangère, plongés dans des conflits aussi prometteurs que rémunérateurs. Plutôt que d’aller chaque année engrosser les rangs de l’armée suisse, cette inféconde institution qui ne prend même plus la peine de nier sa stérilité – y compris quand un avion détourné vient violer sa souveraineté – ils pourront enfin se battre pour une raison, et quitter l’embarrassante compagnie de ces mâles hétéros qui stimulent un conflit qui ne viendra pourtant jamais plus. Mais quelle forme prendra ce mercenariat naturellement certifié « qualité suisse » ?
Comme la plupart des organisations nées au 21e siècle, cette institution prendra les traits d’une plate-forme en ligne de type réseau social, selon le modèle déjà éprouvé par l’ogre Facebook. Elle sera ouverte à toutes les Suissesses et Suisses qui ont au moins seize ans et qui ne souhaitent pas se faire l’armée et vice-versa. Ces derniers pourront créer un profil doté de plusieurs champs à remplir : centres d’intérêt, langues à améliorer, type(s) de relations sexuelles privilégié(s), idéologie politique préférée, produits psychoactifs usuellement consommés ou activement recherchés, etc. En face de ces recrues pleines d’entrain et de bons sens, on trouvera des employeurs potentiels, soient des organisations et des États intéressés par l’engagement de nos chères têtes blondes. Nul doute que des sociétés du divertissement comme Academi (ex-Xe (sic), ex-Blackwater), des organisations caritatives comme Al-Qaïda, ou encore des républiques populaires démocratiques libérales comme l’Arabie Saoudite, seront bigrement intéressées ! Pas de jaloux, même l’armée suisse pourra venir piocher dans ce vivier, et aurait tort de s’en priver : elle pourra finalement embaucher des soldates et soldats qui ont fait la guerre, qui l’ont sentie dans leur chair, et pas des simulateurs impuissants inféconds et non pacsés ™ (UDC Genève, 2007).
Une fois tous ces gai-lurons inscrits en ligne, la magie des algorithmes fera le reste, et mettra automatiquement en relation les employeurs et leurs recrues potentielles ! Jérôme, néo-nazi de 17 ans, dépendant à l’héroïne, trouvera sans doute son bonheur à aller ferrailler en Afghanistan avec Academi tandis qu’Ursula, 25 ans, maoïste tendance capitaliste, s’engagera volontiers aux côtés de la Chine, où elle aura l’occasion rare de pouvoir violenter des moines tibétains à coup d’extincteurs…
Contrairement à l’armée, un tel système ne coûtera rien aux contribuables, le salaire des recrues étant versé par des groupes étrangers ! Par ailleurs, le maintien de la plate-forme en ligne pourra être financé grâce à de la publicité ciblée, que Google, fidèle à sa devise à deux sous, « Don’t be evil », ne verra aucun problème à assumer. Le recrutement étant ouvert à toutes et à tous, la neutralité suisse sera de surcroît préservée ! Et à leur retour au pays, nos intrépides mercenaires, gorgés de souvenirs, auront plein de chouettes histoires à partager, dont des fabuleux chocs post-traumatiques à expérimenter, avec ou sans lunettes 3D.
Bien sûr, il se pourrait que sur certains champs de bataille, des Suisses soient amenés à se rencontrer, dans des camps opposés, au cours d’échanges animés. Alors pour rendre les premières rencontres plus spontanées, un autre algorithme pourra s’assurer que les Suisses qui ont voté contre l’initiative sur l’immigration de masse et ceux qui ont voté pour se retrouvent dans des camps différents : de cette façon, ils éprouveront peut-être même du plaisir à s’entre-tuer ! Et si ce n’est pas le cas, comme le dit-le-con, on ne fait pas de Rösti sans râper des œufs.
Merci pour votre commentaire. Rien à ajouter, je suis tout à fait d'accord avec vous.