Bleu © Violette M.
À l’origine de l’immuable vanité, il fut une racine. Racine d’or, race d’origine. Dans un chant d’absolution, dans un torrent de larmes, dans un univers uni de l’air, dans un flamboyant quartier de lumière, on eut l’idée d’inventer la race humaine. Implantée dans sa Terre mère, on l’arracha de son contact le plus terrestre et embryonnaire. On la découpa en millier de particules qu’on dissémina sur la planète. Ainsi naquirent les milliers de nations…
Issu de la poussière, de l’amer sol et de là (si là dort la mer), l’Humain enfanta par un étrange subterfuge, qui poussa l’amertume à l’affût de la fugue. On fit alors croire à ces doucereux gamins combien le monde n’attendait que leur gloire et combien ce même monde, loin de l’immonde Tartare qu’on se figure au creux de la Terre, n’était que le magnifique Paradis retrouvé. On leur cacha la part radine de l’Humanité, l’obscure récompense de l’obédientielle culture ascensionnelle.
On leur mentit sur la réalité.
Et dans la vie ils sont partis du principe que les princes,
c’était eux.
Ainsi l’Humain remplit sa tâche :
ingurgiter, évacuer, sommeiller, recommencer ;
créer et procréer. Ainsi va la vie ! avait-on déclaré.
La vie dangereuse dans la Nature plantureuse, la Nature généreuse, la Nature sans pitié. Elle faisait peur à l’Humain, parce qu’Elle crée de la poussière, crée des Enfers, crée de sous les mers – et reprend toute la poussière des Enfers et des mers lorsque le sablier s’est écoulé. Alors, l’Humain conscient, effrayé, pour se parer, se protéger contre les forces naturelles, bâtit des ponts, des murs, des toits ; des bombes, des armes, des lances ; des frontières, des bannières, des suaires. L’Humain, pourvu de raison, par peur de ses origines, construisit et créa pour fuir la vanité. Ainsi naquit la beauté et l’art, pure fuite de la cruelle réalité naturelle.
L’Humain creusa et découvrit l’or. Il l’empoigna et le jeta dans ses yeux. Il creusa encore… De l’or, l’Humain continua de croître et de croire. Il poursuivit sa création. Ainsi, de l’or naquirent des générations. Il lui avait tapé dans l’œil, l’or. Quel orgueil, alors, décelé chez l’Humain, au-delà du vain déni de la Mort, L’Âme-Or. Cet or et cet argent, cet art des gens. La gent de toute couleur et de tout genre – les gens qui partagent la même origine, pourtant… Et qui, par Nature, partagent la même rapacité. Acuité fébrile, inventivité fragile…
De l’or, pour nier ses origines, l’Humain créa des groupes planisphères et des boucs- hémisphères. Tandis que les obèses se courrouçaient, les obsédés se corrompaient. Les plus faibles courbaient l’échine devant les plus forts, qui tapaient des mains. Et l’Humain, par cupidité, fuit sa Nature, évita de l’écouter, se noya dans une vaine quête matérielle. De l’or, l’Humain bâtit des tours pour atteindre le Ciel, pour abattre l’Autre, pour délier leurs communes racines. De l’or, l’Humain devint plus bête que toutes les bêtes et gravit les échelons de la montagne du désir. De l’or, l’Humain créa des icônes et des images d’adoration, à partir de la quantité de pièces dorées que ses poches pouvaient contenir. De l’or, l’Humain donna ses pièces pour miser sa vie entière sur l’identique identité des machines de misère – APPARENCES !
Par être, l’Humain entendait paraître. Il confondit son destin avec le reflet de son sein.
L’Humain, à force de foncer droit contre les pierres, aveugle et obstiné, s’inventa une vie d’avatar. Et puis un jour, l’Humain ouvrit les yeux, qu’il avait couvert de ses mains dorées. Et il huma la vaine humanité et vit la vanité obscène. Il se rendit soudain compte combien le monde n’était qu’une scène, et combien le masque qu’il s’était évertué à porter était trop lourd et l’avait éloigné de ses racines, races d’origine. Par désir atroce de s’enrichir, l’Humain oublia quelle était sa quête, les fondations de sa Nature. Il oublia d’écouter la Voix de la Voie. Détrôné d’une Babylone désenchantée, il succomba au mythe décisif. Dans sa chute insupportable, le vain Humain ravala ses rêves de grandeur et de grande heure…
Tombé des nues et des nuées de huées, l’Humain se frotta les yeux plein de poussières et regarda.
L’or y gît.
L’or y gît – ne.
À l’origine, l’or n’y gît plus.
L’or y gît – dans l’origine.
Ainsi l’or, le plus précieux trésor, l’immuable racine se trouvait à l’intérieur du corps, au-delà de l’apparence que l’Humain modelait par pure esthétique, sans éthique, pour l’étiquette et la marque… Ainsi l’or, le plus fondamental, celui de la source de la Nature, de l’origine, ne se trouvait qu’au cœur de l’âme humaine.
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