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Ce n’est pas par hasard que l’on parle plus volontiers d’« enseignement supérieur » que d’« éducation supérieure ». Le mot « éduquer » est dérivé du latin « ducere », qui signifie « conduire » ou « mener ». Or, à partir d’un certain âge, les apprenants peuvent conduire leur barque tout seuls à travers les océans du savoir. Les enseignants continuent à donner des pistes (« enseigner » dérive du latin « insignare », « montrer »), mais ne doivent plus être ces brebis de tête menant le troupeau.
La « capacité autodidacte », la faculté de fixer soi-même ses objectifs, ses méthodes et son rythme d’apprentissage, devrait être un des objectifs principaux du système de formation. Le niveau de compétence d’une population dépend en grande partie de son « savoir-apprendre ».
Toutes les formations comportent une part apprenable de façon autodidacte, que ce soit en lisant, en écoutant un document sonore ou en regardant une vidéo. Cette méthode offre une fantastique oasis de flexibilité dans un monde moderne où il est devenu presque banal de travailler, d’habiter et d’avoir des enfants dans trois villes différentes. Dans cette jungle de rigidités spatio-temporelles, étudier est une des rares activités à laquelle on peut s’adonner n’importe où et n’importe quand, qu’on soit vacancière sur une plage, homme au foyer en train de repasser ou de surveiller la sieste de sa progéniture, pendulaire assis dans un train, chômeuse partielle ou complète, taulard, prostituée en attente d’un client, veilleur de nuit ou gardienne de parking. Malheureusement, il est souvent difficile de faire valider les connaissances acquises de cette manière, sauf dans certains cas particuliers comme les connaissances linguistiques.
En Suisse, le seul examen important ouvert aux autodidactes, deux fois par an, semble être la maturité fédérale, où toute personne âgée d’au moins 17 ans peut se présenter, à condition de payer les frais (variables selon les variantes, d’un ordre de grandeur de 1000 francs au total). Toutefois, il est rendu difficile et inutilement stressant par sa structuration en brochettes d’examens absurdement concentrés : une première session comportant biologie, chimie, physique, histoire et géographie, ainsi qu’arts visuels ou dessin, est suivie, dans un délai d’un an au maximum, par une deuxième session comportant les langues, les mathématiques, les options et le mémoire.
Pour ce qui est des autres formations, une personne souhaitant faire valider des connaissances doit le plus souvent commencer par s’inscrire plusieurs mois à l’avance dans une école et y poser ses fesses pendant une année, avant de devoir passer des examens en sessions concentrées. Pourtant, rien n’empêcherait de donner un libre accès à chaque examen séparément des autres, sans autre formalité qu’un contrôle d’identité et éventuellement l’encaissement d’une taxe. Si on abandonnait la tradition archaïque des « périodes d’examens », certains professeurs seraient sans doute plutôt contents de faire passer dix oraux chaque mois plutôt que cent en une seule fois. Bien entendu, pour qu’un tel système puisse fonctionner, il faudrait imposer aux professeurs l’obligation de publier la documentation nécessaire à la préparation de chaque examen. Le contribuable, qui finance le système de formation, n’a-t-il pas un droit légitime au libre accès, sur Internet, aux contenus produits avec son argent?
Il n’y a évidemment aucune raison pour que l’apprentissage autodidacte soit confiné aux études supérieures. Il serait concevable, dès l’école obligatoire, d’encourager les élèves à préparer certains examens individuellement, sur des sujets de leurs choix, et de passer à distance des examens organisés par une institution se trouvant dans une autre ville ou un autre pays. On peut imaginer la fierté d’un élève réussissant un examen sur un sujet auquel ses professeurs ne connaissent rien.
La nécessaire révolution culturelle de l’enseignement supérieur, qui renoncerait à infantiliser les étudiants et accepterait de les traiter en adultes capables de fixer eux-mêmes leurs rythmes et leurs méthodes d’apprentissage, permettrait de faire mieux avec moins pour ce qui concerne la partie purement théorique des formations. Voilà qui libérerait des moyens pour ce qui relève de la « pratique » : rédaction de documents, débats, expériences, stages, autrement dit, tout ce pour quoi un enseignant ne peut pas être remplacé par un livre ou un film…
Trouvez ici un lien pour des infos relatives à la maturité fédérale.
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